Politique : peut-on être sincère et authentique pour gagner une élection ?

Par Aurélien PAGE , le 7 novembre 2021 , mis à jour le 8 mars 2022 , 2 commentaires - 12 minutes de lecture
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Sport, Médias, Droit, Politique, Histoire, Numérique, Politique ... Oui, les sujets de mes écrits seront riches et variés. J'ai espoir qu'ils susciteront le débat.

C’est le dernier débat télévisé pour les élections législatives. La tension est à son comble sur le plateau. Les candidats ont le visage grave. L’inquiétude de leurs conseillers est palpable. Le direct approche.

Les conseillers en communication ou “spin doctors” profitent des derniers instants avant la prise d’antenne pour transmettre à leurs candidats les derniers éléments de langage à employer.

Le grand débat commence enfin. Les candidats des principaux partis sont présents, la gauche, le centre, la droite, l’extrême-droite, les écologistes … 

C’est une femme quadragénaire habituée du jeu politique qui représente le centre. Son mari et ses deux enfants regardent le débat depuis leur domicile. Son parti ne se bat pas pour l’emporter et fera probablement alliance avec la gauche pour gouverner. 

Les “spin doctors” sont dans les coulisses attentifs aux paroles de leurs champions. Trop souvent, ces débats prennent la forme d’un pugilat où les altercations entre les candidats prennent le pas sur le fond des échanges. 

Quelle doit être la position de la représentante du centre ? Doit-elle réciter les éléments de langage de son spin doctor ? Doit-elle s’en libérer étant donné qu’elle n’est pas favorite du scrutin et faire preuve d’authenticité et de sincérité dans ses propos ?

La communication et le marketing politique influencent de manière grandissante le jeu politique, un constat qui pose la question de l’authenticité et de la sincérité du récit politique. 

I) Du storytelling à l’ère du clash, les excès du marketing politique 

Nous avons tendance à croire que le marketing et la communication politique sont nés aux Etats-Unis pour l’élection présidentielle de 1960 qui opposa John Kennedy à Richard Nixon

Mais les sophistes de la Grèce antique, les “spin doctors” de l’époque, avaient déjà donné le ton. 

Ils apprenaient aux politiques à jouer avec les émotions de leur auditoire pour les séduire et les convaincre. Les siècles ont passé, recourir au marketing et à la communication politique est devenu la règle pour toutes celles et ceux qui souhaitent gagner une élection. 

Dans l’époque récente, deux présidents ont montré qu’ils étaient des professionnels du marketing politique et en particulier du storytelling : Barack Obama et Emmanuel Macron

Deux parcours pour une même tendance dans le récit politique : pour charmer son public, il faut s’adresser à ses émotions.

Pour être élu Président, il faut savoir vendre une belle histoire. C’est-ce que l’on appelle le storytelling, un storytelling dont s’inspire fortement aujourd’hui le copywriting. En tant que copywriter, j’utilise aussi dans mon métier de copywriter le storytelling.

Les maîtres du genre sont naturellement les Américains. Débuté avec l’élection de John Kennedy en 1960, le storytelling “présidentiel” a connu son apogée avec l’élection à la maison blanche de Barack Obama en 2008. 

L’ancien président américain, Barack Obama est le roi du storytelling.

Fils d’un kenyan noire et d’une américaine blanche, travailleur social dans les quartiers difficiles de Chicago, avocat diplômé des universités prestigieuses de Columbia et d’Harvard, sénateur de l’Illinois puis Président des Etats-Unis à seulement 47 ans … 

Comment ne pas tomber sous le charme du récit qui raconte ce parcours ? 

Le storytelling s’appuie sur un mythe, une épopée, des valeurs. Barack Obama pour son élection de 2008 a fait de son parcours, de son histoire familiale sa force principale pour réconcilier une Amérique fracturée après huit années d’administration Bush. 

En France, Emmanuel Macron à l’occasion de la dernière présidentielle en France en 2017 a lui aussi usé du storytelling.

Il s’est présenté comme un personnage de roman et après cinq ans de présidence “normale”, il a répondu au besoin de romanesque des Français.

Né à Amiens, fils de médecins, il monte à Paris pour poursuivre ses études, Science-Po, l’Ena, il devient inspecteur des finances, banquier d’affaires puis ministre de l’économie … 

Un parcours d’excellence, un CV bien rempli qui vient compenser son jeune âge en 2017 : 39 ans.

Tout comme Obama, Macron a su parfaitement raconter son parcours, son histoire. Par petites couches, il a su apporter du relief à son personnage, de la consistance pour qu’à la fin une majorité de Français puisse lui confier leur destin.

Si le storytelling est un excellent levier pour accéder au pouvoir, pour l’exercer c’est plus compliqué. Le storytelling infantilise l’électeur, il endort les consciences. 

Faire appel à l’intellect des citoyens et à la réflexion n’est plus au goût du jour,  On préfère s’adresser aux émotions car ce sont elles qui captivent ! 

Le storytelling sert l’intérêt personnel de son auteur et dessert l’intérêt général. La ou le politique qui recourt au storytelling n’a pour objectif que de se vendre ou de vendre sa vision du pays, une image rêvé éloignée trop souvent du quotidien et des réelles difficultés que rencontrent leurs concitoyens.

Sans oublier que le storytelling n’apporte des résultats que sur le court terme. Il ne résiste pas très longtemps à l’exercice du pouvoir. 

Les colères, les faits divers, les polémiques déconstruisent le personnage politique né du storytelling. Son vrai visage saute peu à peu  aux yeux des citoyens. L’état de grâce est terminé !

Sans oublier que le storytelling est un ressort du marketing politique auquel les citoyens sont de plus en plus habitués. Ils parviennent aisément à identifier les techniques de celui ou celle qui l’utilise.

Beaucoup se sont étonnés de la victoire de Trump en 2016. Mais n’est-ce pas logique de faire le choix de la colère et de la fureur quand les électeurs ne marchent qu’à l’émotionnel ?

N’est-ce pas le risque quand des acteurs politiques préfèrent vendre du rêve à profusion plutôt que de tenir un discours de vérité et d’authenticité ? À trop jouer la corde de l’émotionnel, on éloigne les citoyens de l’entendement et leurs choix au moment des scrutins s’en ressentent. 

Avec l’élection de Donald Trump, nous sommes rentrés dans l’ère du clash. L’homme d’affaires Trump et son principal conseiller Steve Bannon ne se sont pas embêtés à construire un récit relatant son parcours. En même temps, Trump construit déjà son personnage depuis des années entre les séries TV, ses livres et la téléréalité. 

Les Américains le connaissent lui et sa famille. Il va droit au but ! Il s’exprime sans réfléchir. Avec lui, pas de récit construit ou réfléchi. Quelques formules ou slogans bien ciselés pour insulter ou ridiculiser ses opposants suffisent. Le politiquement correct lui importe peu. Il se veut le représentant de l’anti-système. Il frappe dur, fort ridiculise ses opposants, le jeu politique est pour lui un combat de boxe de tous les instants dans lequel il doit triompher. 

Et pour cela, tous les moyens sont bons. Il n’hésite pas à mentir, à tromper. Mais son auditoire est fasciné. En même temps, il lui parle comme à un enfant avec des mots simples, il promet tout et son contraire et ne connaît aucune limite. 

Face à lui, très peu de contradicteurs. Et s’ils osent se présenter à lui, il les écrase ! Trump est aussi en charge de sa communication, il alimente la machine médiatique partout et tout le temps à coup de tweets. 280 caractères lui suffisent pour insulter ses opposants et déformer la réalité. Son seul but : faire du bruit médiatique ! Trump est partout ! Il inonde la scène médiatique et nourrit les réseaux sociaux de controverses en tout genre. 

Avec les années Trump, nous sommes rentrés dans l’ère du clash et des fakes news comme si deux mondes s’opposaient. Ces pratiques sont contagieuses et ont contaminé nos politiques français. La politique est devenue un spectacle permanent. C’est la course à celui qui aura la formule choc pour faire les gros titres des matinales des chaînes d’informations en continu.

Qu’en est-il de la vérité et de l’honnêteté intellectuelle ? Ces principes qui devraient guider tout acteur politique. 

En 2021, à l’heure des réseaux sociaux et des chaînes d’information en continu, les politiques ne savent plus comment attirer l’attention des citoyens. Comment s’adresser à leur cible. 

Alors, ils n’ont pas d’autres choix que de se rendre sur les plateaux d’émissions de divertissement où ils seront sûrs d’être écoutés et vus. C’est ainsi que les ministres du gouvernement se rendent régulièrement sur le plateau de Cyril Hanouna. Même le président de la République doit quitter son costume jupitérien pour jouer le jeu de youtubeurs afin de parler à une jeunesse abstentionniste. 

Mais ces démarches sont-elles authentiques ? Sont-elles désintéressées ? Se rendre sur les plateaux d’émissions de divertissement ou jouer les complices avec des youtubeurs peut-il suffire à retisser le lien de confiance avec les citoyens ? 

II) Plus d’authenticité dans le discours pour retisser le lien de confiance avec les citoyens

Dans cette ère de la fin des idéologies, trop de politiques ont sous-estimé le poids du capital sympathie dans l’opinion.

 Il suffit de regarder les élections présidentielles de 1995 et de 2002 et du duel Chirac-Jospin. Bien aidé par son personnage des Guignols, Jacques Chirac était perçu par l’opinion comme un sympathique “mangeur de pommes”. Face à l’austère Lionel Jospin, la sympathie a triomphé. 

A l’heure de la politique spectacle, des politiques présentés comme des personnages médiatiques, il faut savoir amuser et paraître sympathique. Le sérieux est à proscrire ! 

Et ce n’est pas une nouveauté, regardez les destins politiques des hommes suivants à qui on a reconnu leur sérieux, leur honnêteté intellectuelle, leur transparence et leurs valeurs : Pierre Mendès-France, Pierre Bérégovoy, Jacques Delors, Lionel Jospin, Alain Juppé

Sont-ils devenus Présidents ? Non. Bien sûr, ils restent et sont restés dans l’Histoire comme d’excellents serviteurs de l’Etat. Mais aucune victoire présidentielle.

Ils ont essayé et ont été accompagnés par d’excellents conseillers en communication, mais impossible pour eux de se vendre comme de vulgaires produits.

C’est bien la posture de certains hommes et femmes politiques qui ont préféré la forme sur le fond qui explique pourquoi le lien s’est peu à peu rompu entre eux et les citoyens. 

Ils ont préféré l’émotion et la tromperie à la sincérité.

Il ne faut pas pourtant désespérer ! L’authenticité et la sincérité peuvent encore fonctionner en politique. Regardez la popularité croissante de l’ancien Premier ministre, Edouard Philippe qui a opté pour un discours de vérité auprès des Français durant la crise sanitaire.

Un discours de vérité à mettre d’ailleurs en opposition à celui du président de la République qui a choisi lui un récit guerrier et infantilisant durant la crise sanitaire.

Or, j’ai tendance à croire que nous avons eu l’impression d’être pris pour des enfants durant cette crise du Covid. Dans le monde d’après, les citoyens veulent reprendre les rênes. Ils n’attendent plus un homme ou une femme providentielle. Le storytelling fait désormais pschitt !

Conclusion :

Les citoyens sont en quête de sincérité et d’authenticité de la part de leurs élus. Captiver les citoyens ce n’est pas forcément parler à leurs émotions mais bien à leur raison. 

Ils veulent un discours de vérité, un discours qui parle franchement de la réalité et des difficultés du pays, un parler vrai bien éloigné du storytelling. 

Revenons à notre débat des législatives. Notre candidate du centre a décidé de se libérer de l’emprise de son conseiller en communication. Elle improvise. 

Cette femme quadragénaire mère de deux enfants fend l’armure et parle même sans filtre de sa récente prise de poids et de sa difficulté à trouver une robe pour le débat. 

Dans les coulisses, son conseiller est au bord de la crise de nerfs. Pourtant ce discours de vérité, de sincérité et d’authenticité plaît. On l’écoute.

Vient ensuite le jour du vote. Le petit parti centriste augmente sensiblement le nombre de ses élus. Grâce à un jeu d’alliance, il accède même au pouvoir. Sa cheffe va devenir premier ministre. 

Cette scène est tirée du premier épisode de la série politique danoise, Borgen. Cette excellente série décrit les manoeuvres et les batailles entre les principaux partis politiques pour accéder au pouvoir au Danemark. Elle raconte les sacrifices personnels que cela demande pour le personnage principal, Birgitte Nyborg, femme politique, premier ministre et mariée deux enfants. 

À l’heure de la communication politique à outrance, entre réseaux sociaux et chaînes d’informations en continu, l’authenticité et la sincérité sont des ressorts indispensables pour gagner une élection. 

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    Aurélien PAGE

    Formé au journalisme, je suis rédacteur web en freelance et en entreprise depuis plusieurs années. J'ai été amené à écrire sur des sujets variés (Tourisme, Sports, Droit, Média, Développement personnel, Finance, Emploi, Formation...). Je me suis également formé au copywriting et depuis deux, trois ans je me concentre sur le SEO.

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